Lire les évolutions du sport scolaire du XXIème siècle au miroir du prisme territorial: l’exemple de l’Académie de Lille

Abstract

Si l’histoire du sport scolaire et de ses relations avec l’éducation physique sportive a déjà fait l’objet de doctes travaux^[1], les ressorts et les mutations contemporaines de sa dimension éducative demeurent à ce jour un « angle mort » de l’historiographie, notamment lorsqu’il s’agit de l’observer dans une temporalité resserrée^[2] et un périmètre plus circonscrit que l’espace hexagonal. La présente contribution envisage précisément de lever cette hypothèque, en s’intéressant à la manière dont peuvent se décliner, dans un territoire singulier (ici l’Académie de Lille)^[3], les dimensions éducatives d’un sport scolaire dont les finalités et modes d’organisation ont évolué depuis les années 1980. Par le jeu des chartes, rapports^[4] et des programmes successifs, par la prise en compte des mutations des cultures sportives de la population juvénile^[5] ainsi que les nouvelles formes de pratique proposées par les acteurs de terrain, le sport scolaire a en quelque sorte réalisé son aggiornamento éducatif : si l’organisation de compétitions en demeure la matrice, les associations sportives d’établissement sont tenues de se réinventer, face à l’érosion différentielle de ses effectifs^[6] et aux pratiques concurrentielles d’un monde fédéral également confronté à la nécessaire diversification de ses formes sportives et modes d’engagement^[7]. A cet effet, l’étude des formes d’encadrement et d’animation du sport scolaire dans l’académie de Lille peut constituer un niveau d’échelle pertinent : lieu de confluence des orientations nationales^[8], des singularités territoriales^[9] et des réalités de terrain (via l’étude des projets d’EPS et d’AS d’établissements possédant des caractéristiques particulières – indicateurs sociodémographiques, programmation des APSA, ressources en matière d’équipements sportifs-), ce territoire administratif est aussi le lieu d’une recomposition politique entre les acteurs décisionnels (DAAS, DRAJES, direction régionale et départementales UNSS) censés développer des synergies autour d’une « éducation par le sport » partagée, passées les affres de la crise sanitaire du COVID et dans le contexte des Jeux olympiques de 2024, organisés en France. Mobilisant des données quantitatives (cartographie des AS, taux de licencié(e)s selon les territoires, modalités de pratique selon les établissements et cycles d’enseignement) et qualitatives (monographies d’établissements, entretiens avec les acteurs institutionnels, analyse des projets et textes de référence), cette photographie du sport scolaire en région peut permettre d’en observer les invariants du temps présent (formation des jeunes officiels, dirigeants et coachs ; hybridation des formes de pratiques, évènementiel sportif) autant que les formes de réponse apportées aux enjeux éducatifs et culturels de l’Ecole du XXIe siècle^[10].

^[1] On peut citer à titre d’exemple: Jean-Nicolas Renaud, Julie Grall et Yann Delas, Penser le sport scolaire, pensées sur le sport scolaire (1880-2013), AFRAPS, 2014. Sur l’histoire de l’EPS scolaire: Michaël Attali, Jean Saint-Martin, L’éducation physique de 1945 à nos jours. Les étapes d’une démocratisation, Armand Colin, 2021 (rééd.)

^[2] Sur l’histoire de l’EPS au XXIe siècle:  Tony Froissart, Aline Paintendre, Jean Saint-Martin (dir.), L'éducation physique et sportive du XXIe siècle ou les enjeux d'une EPS de qualité (1981-2021), EPURE, coll. Sport, acteurs et représentations, n°13, 2021, 232 p.

^[3] Le choix de cette académie s’explique par l’étude dont elle fait actuellement l’objet: « enseigner l’éducation physique et sportive, encadrer et animer le sport scolaire au sein de l’Académie de Lille : identités et singularités d’une discipline et de ses acteurs » (projet HILEPSALI, Université d’Artois & INSPE, 2021-2025)   

^[4] Michel Leblanc, Le sport scolaire dans le premier et le second degré, Rapport au Ministre de l’Education Nationale après la consultation nationale sur le sport scolaire, 2001. 

^[5] Consulter à ce sujet: Brice Lefèvre et Fabien Ohl, Les choix des pratiques physiques et sportives des Français : omnivorité, univorité et dissonances. Movement & Sport Sciences, vol. 62, n° 3, 2007, p. 81-90.

^[6] Se reporter ici au rapport général de l’UNSS 2019-2020. 

^[7] Sur ce point: Alain Loret, Anticiper le sport de demain: de Coubertin à Al Jazeera, la nouvelle frontière, Sport Web Intelligence, 2014 (version numérique) 

^[8] On mobilisera à cet effet les éléments du « plan de développement du sport scolaire (UNSS, 2020-2024) » et les modalités de son ancrage territorial 

^[9] Se reporter au projet académique 2022-2025, construit autour de « l’excellence inclusive ». Sur les singularités éducatives: Jean-François Condette, Deux cent ans de progrès éducatifs dans la France septentrionale (1808-2008), Presses Universitaires du Septentrion, 2008. 

^[10] Jean-Noël Luc, Jean-François Condette, Yves Verneuil, Histoire de l’enseignement en France (XIXe-XXIe), Armand Colin, 2020.